▴ Rencontre avec L’atelier Eugène Chimères
[2017] Tous les deux ans, en mai, à Saint-Gilles et à Forest, des artistes ouvrent leur atelier au public. En 2016, dix projets présentés dans le Parcours d’Artistes Saint-Gilles / Forest ont ont été élus coups de coeur du public et seront exposés au BRASS et à la Maison des Cultures de Saint-Gilles. Le vernissage, entre les deux lieux, inaugurera la Joyeuse Ouverture du BRASS et l’exposition se poursuivra jusqu’à fin octobre. Gros plan sur le collectif Eugène Chimères, un des ateliers retenus par le public, dont le travail s’inscrit dans une dimension locale tout en étant tourné vers des questions de société plus larges.
L’atelier Eugène Chimères regroupe Mickomix, Jennyfer Genelé, David Crunelle, Guillaume Lizin, Benoît Pourreau, Anaïs Vivien et Yakana, tous artistes visuels (dessin, illustration, BD, collages, installations, gravure, sérigraphie…). Il tient son nom de la rue où il se situait avant que les aléas de l’immobilier ne poussent les artistes à déménager leur lieu de travail du côté du Botanique.
Le Parcours d’Artistes 2016 se préparait au moment où la “crise des migrants” occupait tous les écrans. Mickomix suggère alors à ses camarades d’atelier de fouiller ensemble la thématique de frontière en travaillant symboliquement sur la frontière la plus proche d’eux, la ligne de séparation entre les deux communes, Saint-Gilles et Forest, sur laquelle est assise leur atelier. Cette frontière devient, dans l’imagination du collectif d’artistes, la ligne de démarcation entre les villes fictives de Fogilles et Saint-Rest, pour lesquelles ils créent passeports, tampons et poste-frontière. “Nous avons demandé au Press & Café, en face du métro Albert, s’il pouvait être un poste avancé de notre frontière et de notre exposition. Le vendeur de journaux a accepté, il fournissait des passeports à ses clients. Yakana qui est caricaturiste, s’est installé dans le commerce pour caricaturer les gens qui voulaient un passeport, ça faisait office de photo d’identité.”
Les citoyens de Fogilles ou de Saint-Rest auxquels un passeport avait été délivré devaient aller le faire tamponner à l’atelier Eugène Chimères. “Une fois qu’ils avaient vu nos installations, dessins, gravures, cartographies subjectives autour de la ligne imaginaire, on les renvoyait vers une autre exposition du Parcours d’Artistes, au home des Tilleuls. “Il se créait un drôle de mouvement dans le quartier” se rappelle Mickomix.
Les artistes d’Eugène Chimères ont proposé aux personnes âgées de la maison de repos voisine d’approfondir avec eux le thème de frontière dans des ateliers consacrés au monotype (un procédé d’impression qui produit un tirage unique), au collage et au dessin. “C’était étonnant d’explorer le rapport de chacun à cette thématique, raconte Mickomix : par exemple, une dame qui avait un super coup de crayon a passé des séances entières à dessiner des créatures mythologiques ailées. Dans un autre style, un ancien annotait ses images avec des phrases vindicatives du type : “2000 ans d’Histoire, et les frontières, on n’y a toujours rien compris !”.