▴ Rencontre avec Jocelyne Burnotte
[2016] Accompagnée par son cocker Cartouche, Jocelyne Burnotte arpente les environs de la place Saint-Denis (Forest), une pile de journaux sous le bras. Elle en distribue aux personnes qu’elle croise, et engage la discussion au passage. Il s’agit du deuxième numéro de « Vivre autour de l’Abbaye », un journal qu’elle a créé, estampillé « Réalisé par et pour les habitants ».
Née dans les années 1950 au Congo, Jocelyne a passé une partie de son enfance à Ixelles, puis vécu à Anvers, puis en France. En 2012, elle a emménagé dans le quartier de l’Abbaye. Membre dès son arrivée du jardin collectif situé sur le site de l’Abbaye, elle s’est rapidement impliquée dans différents clubs et associations, de la peinture à la distribution de légumes de producteurs locaux en passant par la chorale. De fil en aiguille, elle s’est retrouvée à prendre part aux divers réunions et ateliers dans le cadre du Contrat de Quartier Durable Abbaye. Ainsi l’idée a-t-elle émergé de lancer la revue « Vivre autour de l’Abbaye ».
« Mon projet de journal, ce sont des miettes dans l’ensemble du Contrat de Quartier. Mais parfois, les miettes font vraiment envie. »
Jocelyne a mené une carrière de près de trente ans dans l’édition de mots croisés et de mots fléchés. « Les revues dont je m’occupais se vendaient à presque 3 millions d’exemplaires par an. Avec le journal du quartier, il n’y a peut-être que 600 exemplaires, mais j’ai des retours, et je fais des rencontres. Au final, c’est bien plus motivant. »
À la perspective de la réhabilitation du site de l’Abbaye, notamment l’aménagement d’une salle de spectacle et de salles d’exposition, Jocelyne conserve un œil critique : « C’est très bien qu’un un lieu culturel de cette envergure soit prévu à l’Abbaye, cela amènera des gens de l’extérieur. Mais j’espère que ce sera aussi un lieu pour les gens d’ici. Pour cela, il faut par exemple que les prix des spectacles et des expositions restent abordables. Par ailleurs, les habitants du quartier ne sont pas prêts à accepter des choses culturellement trop pointues ou trop avant-gardistes. Ici, il y a ici un brassage qui se fait, entre des cultures populaires de différentes origines, mais tout doucement. »
Beaucoup d’orientations pratiques et techniques relatives au futur pôle culturel et associatif se décident justement en ce moment, nous confie Vincent Degrune, chef de projet pour la réhabilitation du site : « Nous sommes dans la phase d’élaboration : nous établissons le plus clairement possible quelles sont les ambitions du projet, les compétences nécessaires… Le lieu aura-t-il besoin d’un scénographe, d’un éclairagiste, d’un curateur…? Il y a toute une réflexion sur la programmation, les plannings, la manière dont le lieu sera géré, les questions d’entretien, de sécurité, les horaires d’ouverture, etc. Le site représente quatre hectares et demi ouverts sur le quartier : le chantier sera tellement gigantesque que nous devons être certains de partir sur un projet cohérent dans son ensemble. Tout cela se discute en équipe. »
Jocelyne a terminé la distribution de sa pile de journaux, elle se dirige vers le café où elle a ses habitudes sur la place Saint-Denis. Elle aime cet endroit parce qu’on y côtoie « des gens pas snobinards et hauts en couleurs ».
« Peut-être que le pôle socio-culturel de l’Abbaye changera l’atmosphère du quartier », admet Jocelyne. Mais l’essentiel, à ses yeux, est que le quartier n’y perde pas son âme.
En savoir plus sur le futur Pôle ABŸ : aby.brussels
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… Histoire de l’Abbaye de Forest, en bref
Les origines de l’Abbaye remontent à 1105 à l’époque où Le village de Forest ne compte alors que quelques maisons au bord du Geleytsbeek (affluent de la Senne). Au cours des siècles, l’Abbaye connaît des guerres, des épidémies, des occupations diverses, des incendies, des troubles religieux, mais aussi des périodes très prospères, notamment au 17e siècle.
1794 Craignant l’arrivée des troupes révolutionnaires françaises, les religieuses fuient en Allemagne, emportant archives et reliques. Peu après leur départ, l’Abbaye est pillée, puis fermée.
1964 La Commune de Forest en fait l’acquisition et entreprend sa restauration.
2016 Le projet de réhabilitation de l’Abbaye prévoit que le site accueille la Bibliothèque francophone, l’Académie de musique, de danse et des arts parlés, un espace jeunesse, une salle de spectacle exploitée par le BRASS, des salles d’exposition et des espaces de résidence d’artistes.
2023 Ouverture du Pôle culturel